– Que nous vaut cette charmante visite ? m’interpella une douce voix grave alors que j’avançais au milieu du chemin, la tête dans les nuages.
Je sursautai et revins dans le moment présent. J’avais en face de moi deux elfes au teint légèrement basané. La couleur argentée de leurs cheveux me rappelèrent ceux de ma mère et de toute évidence, leur ressemblance frappante indiquait qu’ils étaient frères jumeaux.
– Comme je manque à tous les préceptes de bonne conduite ! Laissez-moi me présenter, je suis Golphedinir, et je suis le maître des apprentis, ici, à Celondim. Et voici mon frère Curubrannon qui s’occupe des guildes d’artisans.
Tous deux s’inclinèrent devant moi. J’étais assez impressionnée, mais était-ce peut-être la conséquence de ma prise de distance avec d’autres personnes depuis que j’étais partie de chez moi. Je fis une petite courbette à mon tour.
– Je suis enchantée de faire votre connaissance, maîtres Golphedinir et Curubrannon. Je suis Lizeth Heliandil, commençai-je. Je suis à la recherche de quelqu’un, et peut-être pourrez-vous m’aider.
– C’est un honneur, Lizeth Heliandil, répondit Golphedinir. Nous ferons de notre mieux pour vous informer et vous aider.
Sa réponse neutre m’informa surtout que mon nom de famille n’évoquait rien pour lui et qu’il n’avait jamais entendu parler de mon père. J’étais un peu déçue, mais aucunement vaincue.

J’avais en face de moi deux elfes au teint légèrement basané.
– Je suis en possession d’un pendentif qui semble avoir été fabriqué ici. J’aimerais parler avec le maître bijoutier, pourriez-vous m’indiquer où il travaille ?
– Celui que vous cherchez n’est plus ici, mais je peux vous diriger vers son apprenti, Haldan. Il devrait pouvoir vous renseigner au sujet de votre pendentif. Il se trouve derrière cet entrepôt, sous la coupole.
– Je vous remercie, maître Golphedinir.
Je réajustai mon sac sur mon épaule et regardai dans la direction que l’on venait de m’indiquer. Les caisses de l’entrepôt m’empêchaient de voir clairement ce qui se trouvait derrière. Je m’apprêtai alors à prendre congé quand mon regard se posant sur Curubrannon, je pensais que je pourrais profiter un peu plus de la présence de ces deux aimables Elfes pour avoir le cœur net en matière de vocation. Me mettre aux travaux pratiques ne me ferait pas de mal et je pourrais arrêter de m’apitoyer sur le faible poids de ma bourse.
– Je souhaiterais abuser d’un peu plus de votre temps pour une question, si vous me permettez.
– Allez-y, nous sommes là pour ça, dit Golphedinir avec un léger sourire.
– J’ai toujours aimé l’Histoire et les vieux écrits, mais dernièrement, je chasse et je voyage beaucoup, et les parchemins ne me sont pas vraiment d’un grand secours, si vous voyez ce que je veux dire.
– Tournez-vous vers la guilde des tailleurs, dame Lizeth, répondit Curubrannon en faisant un pas en avant, et les peaux que vous récupèrerez de vos séances de chasse seront entre de bonnes mains ! Et agrémentez aussi vos pérégrinations de quelques récoltes, Haldan pourra vous dire que le marché des pierres et métaux est toujours en plein essor.
– C’est un conseil que je suivrai, merci beaucoup, maître Curubrannon. Au plaisir de vous revoir.
Je m’inclinai et les quittai, un sourire aux lèvres et le cœur un peu plus léger.
La coupole n’était pas comme celle de Gilbor sur la place du marché. Au lieu d’avoir un toit de grosses tuiles vertes, celle-ci était fabriquée en fer joliment forgé. La cime du chef d’œuvre était couverte de lierre et de petites fleurs mauves, et cette végétation retombait tantôt sur les colonnes de marbre finement ciselées de motifs de feuilles, tantôt agrippée à d’autres arabesques de fer.
Les quelques marches de pierre m’amenèrent à un petit atelier où travaillaient deux autres Elfes. Mais ceux-là étaient totalement différents des deux maîtres artisans que je venais de rencontrer. Ils étaient concentrés avec ferveur sur leur ouvrage, et je restais là à les regarder pendant deux bonnes minutes, n’osant pas les déranger. Celui de gauche donnait des instructions à l’autre Elfe sur ce qui semblait être des planches servant à confectionner des tonneaux. Un autre établi sur la gauche et les nombreux outils d’artisan bijoutier s’y trouvant m’indiquèrent que j’étais à la bonne adresse.
– Excusez-moi, messieurs… tentai-je d’articuler, pas très sûre de moi.
Les deux Elfes se retournèrent à l’unisson, très surpris de me voir juste derrière eux.
– Veuillez pardonner mon intrusion ! Bonjour ! m’exclamai-je en levant la main un peu maladroitement. Je suis à la recherche de l’apprenti bijoutier. Maître Golphedinir m’a informée que je pourrais le trouver ici.
– Bregedur, vous pouvez continuer à travailler sur ces tonneaux sans moi ?
– Bien sûr, Haldan. Si vous me permettez, mademoiselle ? dit Bregedur en s’inclinant et en retournant à son travail.
Haldan s’approcha de moi et me pria de le suivre.
– Je m’appelle Haldan, à qui ai-je l’honneur ?
– Je suis Lizeth, je voulais m’entretenir avec votre maître, mais il est absent à ce que l’on m’a dit.
– Absent est un faible mot, dame Lizeth, la plupart de nos meilleurs artisans sont partis pour l’Ouest, et, hélas, ils ne reviendront pas. C’est en effet le cas de mon maître. Je m’occupe de son affaire, et j’ose penser que j’ai pris définitivement sa place, bien que loin de lui arriver à la cheville. En quoi puis-je vous être utile ?
– Pourriez-vous jeter un coup d’œil à ce pendentif ? lui demandai-je en lui montrant le petit objet. Vient-il bien d’ici ?
– Et bien, je ne voudrais trop m’avancer, mais il semble en effet que ce bijou ait été fabriqué ici. Mais ce n’est pas la signature de mon maître, bien que je puisse vous affirmer que cela ressemble beaucoup à son travail. Où l’avez-vous eu ?
– Il vient de mon père. C’est pour cela que je suis venue. Je suis à sa recherche, et je pensais que je pourrais trouver un indice ou deux en venant à Celondim.
– Mon maître vivait ici depuis très longtemps, ce pendentif a dû être confectionné par l’un de ses anciens apprentis. C’est une très belle pièce. Je me souviens de quelques-uns d’entre eux, du moins depuis que je suis arrivé. S’il était artisan, peut-être est-ce lui qui a fait le pendentif. Comment s’appelle votre père ?
– Dhuilin Heliandil.
Son expression de surprise ne m’échappa pas. Cet Elfe connaissait mon père.
Dhuilin Heliandil. En me réveillant, je n’avais pour information sûre que son nom, son lien de paternité, et ce petit pendentif doré. Des maigres indices pour un si grand monde, mais je devais me contenter d’eux.
Cependant, grâce au bijou, Haldan venait de m’apprendre que mon père avait été sûrement l’un des apprentis de son maître qui avait pris le départ pour Valinor, au royaume d’Aman. Il avait abandonné ainsi la Terre des Mortels, et tout espoir pour moi d’avoir un véritable témoignage du passage de mon père.
Néanmoins, à en croire la réaction d’Haldan lorsque j’ai prononcé son nom, il semblait que j’allais très bientôt en apprendre plus sur le passé de mon très cher père.
– Vous êtes la fille de Dhuilin !! s’exclama Haldan, en écarquillant les yeux. Je n’aurais jamais cru qu’il puisse avoir l’envie ou le temps de fonder une famille !
– Vous connaissiez donc mon père ? demandai-je de manière un peu rhétorique.
– Pour sûr que je le connaissais, c’est lui qui m’a entraîné dans la vocation de bijoutier ! C’était un sacré personnage, toujours occupé à faire quelque chose. Concernant son travail, il était toujours très précis, et il pouvait recommencer de nombreuses fois la fabrication d’un bijou avant d’être satisfait. Malgré cela, il n’hésitait jamais à nous venir en aide. Nous étions plusieurs à l’époque, alors vous imaginez le travail qui était réalisé.
Je buvais ses paroles, enregistrant et analysant le moindre détail qui pourrait m’indiquer où je pourrais trouver mon père. Malheureusement, Haldan ne semblait avoir eu qu’une relation strictement professionnelle avec lui. Au bout d’un moment, je le coupai:
– Et en dehors des journées de travail, que faisait-il ? Pourriez-vous me dire s’il avait rencontré d’autres personnes, peut-être des étrangers ?
– Je dois vous avouer, dame Lizeth, qu’une fois l’établi nettoyé en fin de journée, Dhuilin était aussi muet qu’une tombe. Mais Celondim est une petite ville et les informations y circulent bien. Même si quelqu’un cherche à cacher son passé, il finit toujours par remonter à la surface ! Votre père était très secret, mais la manière dont il évitait les foules et les tavernes indiquait qu’il cherchait à ne pas attirer l’attention. Il refusait de faire les livraisons et préférait rester à l’atelier.
– Vous pensez qu’il se cachait ? Il avait donc des ennemis ?
– Qui sait ? Peut-être bien que oui. J’avais réussi à le convaincre de louer ensemble une chambre, car lorsque l’on est apprenti, la majorité des revenus reviennent au maître et à l’achat de nouveaux matériaux. Le jour où il est parti, ça a été un peu dur pour moi.
– Que s’est-il passé ?
Haldan m’emmena à l’ombre de quelques arbres et s’assura que personne n’écoutait. Il s’approcha de moi pour refermer le cercle de la confidence.
– C’est une situation très délicate, dame Lizeth, dit-il en chuchotant presque. Je revenais du marché où j’avais fait quelques courses lorsqu’à un détour d’une ruelle, j’ai remarqué votre père en grande conversation avec deux hommes cachés sous des manteaux de voyage. Je n’ai pas pu déterminer exactement de quelle race ils étaient, mais ils ne semblaient pas très amicaux. Puis j’ai vu Dhuilin sortir son arme. Je m’en souviens très bien, c’était une très belle épée à la garde raffinée et incrustée de pierres précieuses. Il s’est battu contre les deux étrangers, et j’étais surpris de l’adresse qu’il témoignait. Mais contre toute attente, votre père a fini par être blessé par l’un de ses assaillants. Leur combat s’est terminé un peu plus loin, et je ne pus en voir davantage. Si le lendemain, je n’avais pas entendu dire qu’il manquait un cheval à l’écurie, j’en aurais probablement conclu qu’il avait succombé. J’en suis sûr du contraire, à présent, puisque vous êtes devant moi.
Je m’étais préparée au pire, mais je restais cependant muette de surprise. En effet, cette altercation avait probablement poussé mon père vers les terres de la Forêt Noire, bien loin d’Ered Luin, où il avait fini par rencontrer ma mère. Il avait donc des ennemis depuis très longtemps, et il n’avait sûrement pas prévu d’y être retrouvé. J’étais maintenant fixée : la disparition de mon père était de près ou de loin liée à cette affaire et même si j’étais terrorisée à l’idée d’en savoir plus, je souhaitais plus que tout au monde suivre les traces de celui qui, pour protéger sa femme et ses deux filles, avait fui devant le danger.
– Vous avez dit que vous n’aviez pu identifier exactement les origines de ces hommes, qu’en pensez-vous ? demandai-je.
– Je ne voudrais pas vous induire en erreur, mais sous leur capuchon, j’ai cru voir des visages d’hommes, et à la lueur des torches voisines, ceux-ci était olivâtres et barbouillés de cicatrices, ou peut-être étaient-il simplement déformés.
– Comme des Orques ? m’exclamai-je de stupeur et un peu trop fort.
– Certains en auraient déjà vus, bien plus à l’Est.
Catégories: BG de Lizeth Fanfiction LOTRO
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