Je ne me souvenais pas du moment où je m’étais assoupie. Ce voyage m’avait épuisée tant physiquement que mentalement, surtout depuis que j’avais dû céder mon cheval juste avant d’entrer en Ered Luin, mais dormir du sommeil du juste était une bénédiction et lorsque je me réveillai à l’aube, écoutant les oiseaux piailler, je me sentais plus fraîche qu’une rose. Le soleil allait bientôt monter dans le ciel, et je voulais arriver avant que l’effervescence de la ville ne soit à son comble.
Je me hâtai de me chausser, remis avec précaution le médaillon dans la pochette de mon petit sac que j’attachai de nouveau à ma ceinture. Après m’être assurée que le feu était bien éteint, je me mis en route, un petit morceau de lembas en bouche en guise de petit déjeuner. Le lembas avait été plus que le bienvenu la grande majorité de mon périple lorsque je ne pouvais rejoindre une ville ou un village avant plusieurs jours. Mais je ne refusais pas de temps à autre de goûter à la nourriture des Hommes ou des Hobbits parmi lesquels j’étais passée, bien que je n’eus été très friande de viande.
En descendant dans la vallée, je remarquais comment la nature s’éveillait petit à petit, flore comme faune. Des lapins sortaient prudemment de leurs terriers et il me vint à l’esprit que je pourrais en attraper un ou deux et les mettre en réserve pour plus tard ou pour usage de troc étant donné le peu de monnaie que je transportais. En une fraction de seconde, j’avais encoché une flèche et avais bandé mon arc. J’étais prête à tirer lorsque j’aperçus quelque chose dans mon champ de vision vers la droite. Toute une ribambelle de musaraignes courait au bas d’une petite colline, suivie par … deux loups !
– Un loup ou deux, c’est mieux qu’un lapin ! pensai-je sur le coup. Ça fera assurément du bien à ma petite bourse !
Je changeai rapidement de cible, et tirai une flèche. Ce fut suffisant pour abattre le premier animal. Le second sauta sur ce je pensais être une famille de musaraignes tachetées, et commença à s’acharner sur les petites bêtes. Le loup s’écroula après avoir reçu une autre de mes flèches, l’une des bestioles encore dans la gueule. Très vite, je courus vers les deux canidés. Le premier bougeait encore, et d’un geste net et précis, je lui tranchais la gorge pour abréger ses souffrances. Le deuxième loup était mort sur le coup, ma flèche lui ayant transpercé le crâne. C’était de belles bêtes, mais il me serait difficile de les transporter. Deux lapins entraient dans un sac, mais pas deux loups !
Je tirai les cadavres sous quelques buissons et cachai mon butin. J’étais juste à côté de la ville, et je viendrai les chercher plus tard.
Je rattrapai la route en courant, et atteignis les premières maisons une demi-heure plus tard.
La vue qui se présenta alors devant moi me coupa le souffle, même si j’avais déjà traversé quelques cités elfiques. Les tours de la cité portuaire de Celondim étaient parsemées de-ci de-là de chaque côté de la rivière Lhûn, telles les gardiennes des Terres des Elfes. L’architecture si particulière des êtres de ma race, toute en arches et arcades et aux toits ronds, s’inscrivait à la perfection parmi les cerisiers qui agrémentaient la vue de leurs couleurs rose et blanche.

La vue qui se présenta devant moi me coupa le souffle
Je fus surprise de constater que la ville était déjà bien réveillée et que c’était jour de marché. Je n’aurai probablement aucun problème à revendre mes prises matinales aujourd’hui. Je me dirigeai parmi la foule, et montai les quelques marches menant à l’esplanade du marché.
– Hey, grande dame Elfe, n’aimeriez-vous pas manier les plus belles lames des Montagnes Bleues ? Le savoir des célèbres forgerons de Nogrod !
Nogrod… N’était-ce pas une cité naine du Premier Âge où vivait Telchar, celui qui forgea Narsil, l’épée qui trancha le doigt de Sauron lors de la Guerre de la Dernière Alliance des Elfes et des Hommes à la fin du Second Âge ? Je remerciai intérieurement les enseignements de ma mère et je regardai le nain qui se tenait devant moi derrière son étal rempli d’épées, de dagues et d’artefacts de toutes sortes. Un grand sourire éclairait son visage et il était vraisemblablement en train d’attendre une réaction de ma part devant « le savoir des célèbres forgerons de Nogrod ». Il me semblait bien qu’il ne pouvait pas rester grand-chose de ce savoir après si longtemps – 6500 ans s’étaient écoulés quand même – mais je voulais voir jusqu’où pouvait aller ce petit bonhomme pour vendre sa marchandise.
– Cette dague semble émoussée, et elle n’est pas très bien équilibrée, dis-je en soupesant le petit poignard.
La petite pierre bleue sur la poignée de l’arme avait attiré mon attention et camelote ou pas, l’objet me plaisait bien et trouverait sa place dans ma botte.
– « Le coutelas de Drokki », l’une des plus belles pièces de ma collection. Il tient son nom de mon arrière-grand-père, qui était lui aussi forgeron mais également un grand guerrier ! Cette arme a un passé hors pair, et a tranché de nombreuses gorges de sangliers des montagnes. Ma famille n’a jamais manqué de nourriture et c’est bien grâce à cette merveille.
Je me retenais de rire en imaginant un nain tenir entre ses doigts potelés une dague aussi grande qu’un couteau à beurre. C’était davantage une arme forgée pour une dame, à moins que son arrière-grand-père ne soit en réalité son arrière-grand-mère, ce qui ne ferait peut-être pas grande différence après tout. Il n’empêche que nous passions de la forge de Narsil aux prouesses de l’arrière-grand-père Drokki.
– Comment vous appelez-vous, maître nain ? demandai-je.
– Hugnir, pour vous servir, répondit le marchand en inclinant un peu la tête.
– Je vous l’achète pour cinq pièces d’argent, Hugnir, avançai-je dans un premier temps.
– Cette dague en vaut bien le triple, ma petite dame. La lame du « coutelas de Drokki » peut couper n’importe quelle peau ou branche, vous êtes une chasseuse, n’est-ce-pas ? Je vous parie cinq pièces d’argent qu’il est de meilleure qualité que le poignard que vous avez à la ceinture.
Je baissai les yeux sur ma dague et considérai son offre.
– Et moi, je vous en parie dix que non ! le contrai-je.
Je n’avais pas ladite somme en poche, mais le nain ne le savait pas, et un peu de bluff ne mangeait pas de pain. Le regard du marchand se rétrécit. Il semblait réfléchir à ce qu’il pouvait perdre. Il secoua légèrement la tête, comme pour chasser une mauvaise pensée. J’étais prête à tout écouter.
– Je ne changerai pas d’avis, mes dagues sont les meilleures de tout Celondim, même Gilbor n’arrive pas à ma cheville !
Je sentais qu’il devenait quelque peu nerveux. J’étais sûre de mon arme, l’ayant affûtée la veille et je n’avais pas menti en disant que la dague du nain était émoussée, ce qui n’était pas un si grand mal, car une fois entre mes mains, elle serait à la hauteur de mes attentes.
– Très bien, vérifions ça tout de suite, dis-je. Où est ce Gilbor ?
– Gilbor ? Il est là-bas, sous la petite coupole, m’informa le marchand en me montrant un elfe habillé d’une robe jaune-vert.
Je reposai le poignard sur le présentoir d’Hugnir et allai chercher Gilbor. Tout en revenant, je lui racontais toute l’histoire et il sembla très intéressé d’avoir le rôle de « la main innocente ». Je pensais surtout qu’il espérait bien calmer les ardeurs de son rival, qui devait lui voler quelques clients. Toutefois, je savais qu’il serait totalement impartial et nous départagerait tout comme il le fallait. Je sortis la dague que je portais au côté, et la lui tendis. Il l’examina dans un premier temps et sortit de sa poche une petite plaque en acier. Avec précaution, il y appliqua la pointe de ma dague et y grava quelques signes elfiques. Ceci fait, il me rendit mon arme, prit la dague d’Hugnir et après l’avoir regardée sous tous les angles – le nain avait émis par ailleurs un toussotement quand Gilbor avait haussé un sourcil désapprobateur en identifiant les imperfections du fil de la lame – il écrivit les mêmes signes elfiques sous les précédentes. Il souffla sur la plaque pour faire disparaître la poussière d’acier, et nous la montra.
– Il semble que la dague de dame Lizeth, bien que pourvue d’un petit manche rudimentaire en bois d’if, a bel et bien laissé une trace plus profonde et plus nette que le coutelas de maître Hugnir.
– Par la barbe de Thorin, on ne peut faire confiance à un Elfe !! Vous avez appuyé plus fort avec son petit couteau, j’en suis sûr et certain !
– Je n’oserais jamais, mais je suis cependant catégorique, votre arme, maître nain, est légèrement émoussée. Je crains donc que dame Lizeth ne soit la gagnante de ce pari.
Tandis que je fouillais dans ma bourse, j’entendais le marchand ronchonner dans sa barbe.
– Allons, monsieur Hugnir, ne faites pas cette tête. Tenez, voici cinq pièces d’argent qui s’ajoutent aux dix que je viens d’acquérir. Ça fait donc quinze pièces d’argent pour le coutelas, comme vous l’aviez annoncé !
C’est un nain défait que je quittai et remerciais discrètement le fabricant d’armes Gilbor d’un petit clin d’œil.
J’avais acquis une jolie petite dague, et je me dirigeai à présent vers ma destination où j’espérais rencontrer la personne qui m’aiderait à débuter ma quête. En route pour le quartier des artisans.
Catégories: BG de Lizeth Fanfiction LOTRO
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