Je venais de passer l’après-midi à me préparer, et plusieurs servantes s’occupaient de moi. Elles répondaient à mes moindres désirs, et c’était plaisant. Cela faisait une éternité… non, cela ne m’était jamais arrivé, mais j’avais adoré que l’on prenne ainsi soin de moi. Après une manucure parfaite, elles avaient passé un temps fou à faire disparaître la couleur blonde de mes cheveux afin de les rendre aussi noirs que le charbon. Puis l’on m’avait recouverte d’une poudre qui blanchissait mon teint, avant de maquiller mes yeux de noir. En regardant dans un miroir, je ne me reconnaissais pas, et pourtant, je ne me suis jamais vue aussi belle, dénuée de toute faiblesse, altière. La robe que j’enfilai ensuite m’aurait fait rougir quelques jours auparavant. Elle laissait voir la quasi-totalité de mes longues jambes grâce à deux échancrures sur ses côtés, et laissait entrevoir un décolleté plongeant.
– Qui a donc imaginé et confectionné cette robe ? demandai-je en observant ma silhouette. Elle est… extraordinaire.
La jeune fille qui me tendit deux gants de soie ne répondit pas. Elle gardait les yeux baissés et restait muette. Les autres ne firent pas non plus mine de répondre.
– C’est moi-même, ma Reine, répondit Gologmolva qui venait d’apparaître derrière-moi. Enfin, je l’ai faite faire. Vous plait-elle ?
– Oui, elle est parfaite. On dirait une seconde peau. Comment avez-vous su ?
– Vous le savez déjà, ma Reine, affirma-t-il en tenant dans ses mains un grand coussin sur lequel il y avait un masque et une couronne.
– Vous avez raison, conclus-je en continuant de me contempler dans le miroir sous tous les angles.
Une fois la couronne sur la tête et le masque sur le visage, un frisson me parcourut tout le corps. Le moment était venu, je le savais. Je devais embrasser ma destinée et elle ne pouvait s’épanouir sans tirer un trait sur mon passé.
– Vous êtes prête, ma Reine, allons-y, déclara Gologmolva en ouvrant la porte de ma chambre.
– Oui, ne faisons plus attendre nos invités.
Nous parcourûmes une partie de la forteresse de Dol Goldur seuls. Le bâtiment était imposant, mais mal entretenu. Les évènements induisaient les allers et venues de centaines de soldats, et il n’était sûrement pas aisé, voire impossible d’y mettre de l’ordre. Les murs, les plafonds, et les colonnes étaient recouverts de toiles d’araignées, et les éléments décoratifs se résumaient à des tapis, à des tentures et drapeaux aux couleurs rouges, et à des chandeliers.
Une fois dans l’une des grandes salles, des individus vêtus de houppelandes pourpres se joignirent à nous et nous escortèrent. Ils formaient deux files, bien disciplinées, et je ne me serais pas cru plus en sécurité qu’à ce moment-là. Gologmolva, quant à lui, me suivait et portait de nouveau ce masque doré qu’il semblait préférer. Une vague de chaleur m’entoura au moment où plus loin nous entrâmes dans une pièce remplie à craquer d’Orques, de Semi-Orques, d’Ourouks et de gobelins. Certains avaient pris place sur des bancs tandis que d’autres étaient assis à même le sol ou étaient adossés contre les murs. Gologmolva passa alors devant moi et nous remontâmes l’allée. Cette scène m’était bien évidemment familière, puisque je l’avais déjà vécue plusieurs fois en rêve, et ce fut un visage de marbre que je montrai en arrivant presque devant l’estrade. Je devais me trouver par-là, complètement choquée. Avant de reprendre ma route, je caressai mon pendentif comme pour m’assurer qu’il était encore là.
Les acclamations du public quand je retirai mon masque et levai fièrement les mains vers le ciel finirent de m’enchanter. C’était encore plus jubilatoire que dans mes souvenirs. Je m’assis dans un fauteuil plus que confortable, et attendis que Gologmolva fassent les présentations.
– Merci d’être venus acclamer notre nouvelle Reine ! Le Seigneur Ténébreux l’a choisie et l’a formée depuis des années à le devenir, s’exclama-t-il.
Puis l’Œil de Sauron apparut, et tout le monde s’inclina. Je baissai moi-même légèrement la tête en signe de respect et de dévotion. Après avoir ordonné à ses sbires de suivre notre commandement, je tressaillis quand il se tourna vers nous. Son regard était impressionnant.
– Gologmolva, je suis content de toi, dit-il à l’attention de Gologmolva. Sa transformation est parfaite. Ton travail sera récompensé.
– Merci, Maître. Vous servir est déjà une récompense, répondit Gologmolva.
– Il semble que tu nous réserves encore un petit quelque chose pour ce soir ?
– Oui, Seigneur, la preuve que notre Reine abandonne son ancienne vie pour la nouvelle.
– Je ne puis attendre plus longtemps, alors…
Et Gologmolva intima la foule à se taire et tapant dans la paume de ses mains, invita les prisonniers à entrer accompagnés de leurs tortionnaires. Mes anciens compagnons étaient tous salement amochés, et j’imaginais les tortures qu’ils avaient dû subir avant d’arriver jusqu’ici. Ils arrivèrent dans le même ordre : Orchysdal, Thalesir, Eljoying, Orriath, Siloinsiproche, Moela et Amynduilas, et tous avaient les mains liées dans le dos. Ils étaient plus lorsqu’ils avaient été faits prisonniers, et certains avaient succombé sous nos épées, notamment Habricotine et Irileith. Ça avait été une sacrée bataille ! Quant aux autres, ils n’avaient peut-être pas supporté la torture. Je savais tout au sujet de ce que me réservait Gologmolva, aussi ne réussis-je pas à montrer ma surprise.
Les Orques obligèrent les détenus à se mettre à genou, sauf Amynduilas qui resta immobilisé à l’écart, forcé à regarder la même scène que moi. Chaque monstre positionna son glaive sur la nuque de celui ou celle qui se trouvait devant lui. J’eus presque envie de détourner les yeux, mais m’obligeai à garder les yeux rivés vers ceux qui allaient mourir. Aucun ne montra signe de faiblesse, aucun n’implora pour sa vie. La tête baissée, ils avaient les yeux fermés, et semblaient accepter leur destin. Ils tombèrent à l’unisson au sol, lorsqu’ils eurent la base du crâne sectionnée.
– VOUS N’ÊTES QUE DES LÂCHES !! cria Amynduilas en se débattant. Des larmes de colère traçaient des sillons sur ses joues poisseuses.
Gologmolva s’approcha de moi et posa sa main sur mon épaule. Sans le regarder, je compris ce que je devais faire pour prouver ma loyauté, et pourquoi l’on m’avait attachée une dague à la ceinture. Je me levai et parcourus les quelques pas qui me séparaient d’Amynduilas.
– Rosalynd… Nous avions confiance en toi, pourquoi nous as-tu trahis ? m’interrogea-t-il, la voix brisée.
Ses mots me frappèrent en plein cœur, mais je tins bon. J’avais trahi mes amis et la cause que nous avions embrassée. J’avais trahi Amynduilas, que j’avais aimé de toute mon âme. Mais à présent, il n’y avait plus de retour en arrière possible.
– Je préfère être du côté des vainqueurs, répondis-je. Et j’ai compris une chose, que ça n’allait pas être en restant la gentille petite Elfe que je pourrais enfin gagner. J’ai longtemps hésité, j’ai refusé toutes les fois où Gologmolva m’a tendu la main. Et finalement, dans son incroyable bonté, j’ai été pardonnée ! Ce fut le plus beau jour de ma vie quand j’ai enfin compris toute l’histoire !
Amynduilas fronça les sourcils alors que j’éclatai de rire. Il y avait cette indicible tristesse dans ses yeux. Il avait pitié de moi.
– Tu n’es pas obligée de faire ça, … commença-t-il avant que je ne lui pose mon index sur les lèvres pour le faire taire.
Je m’avançai vers lui et caressai sa joue de la main gauche, tout en m’approchant de son oreille pour lui murmurer quelques mots.
– Si je suis si sombre à présent, c’est que les ténèbres ont toujours été en moi…
Je lui remis alors délicatement l’une de ses mèches en place et plongeai mon regard dans le sien.
– Mais avant la suite, il y a quelque chose que je brûle de faire.
Il n’opposa aucune résistance lorsque je l’embrassai. Il me sembla même qu’il répondait favorablement à mon baiser. M’aimait-il toujours, même après les avoir tous trahis ?
Je reculai, et le regardai, hésitante. Une toute petite seconde. Puis empoignant la dague, je lui tranchai la gorge.
Catégories: BG de Lizeth Fanfiction LOTRO
…
Bah quoi Gamleth ? :p Toujours un peu plus de ce rêve prémonitoire, mais je pense que c’est bon, j’irai pas plus loin, c’est déjà bien assez.