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Lizeth Heliandil BG#55

Les chevaux ne voulurent pas s’aventurer plus avant dans le marécage qui se trouvait tout autour de nous. Les Champs aux Iris s’étendaient à perte de vue et il n’y avait malheureusement aucun chemin pour les traverser depuis l’endroit où nous nous trouvions. Nous avions parcouru pendant toute la journée la moitié du chemin vers notre destination, et les bêtes étaient fatiguées. Je me rendis compte que nous n’aurions pas dû tant nous avancer dans la zone.

– Peut-être devrions-nous rebrousser chemin et contourner le marais ? proposai-je à Chandra qui tentait de pousser les chevaux pour les faire avancer. Il n’y a pas assez de visibilité, et tu n’auras pas tout le temps pied. Les chevaux l’ont bien compris.
– Cesse donc de te plaindre, Lizeth. Si les chevaux ne veulent pas continuer, on les laissera derrière.

Comme pour illustrer ses propos, Chandra lâcha les brides qu’elles tenaient dans les mains et après avoir réajusté sa besace, elle défit son baudrier pour empêcher ses armes de toucher l’eau, puis reprit sa route. J’étais surprise de sa réaction et restai une seconde à mi-chemin entre les chevaux que nous allions abandonner et Chandra avant de finalement être obligée de suivre mon corps.

– Nous allons passer toute la nuit à patauger dans l’eau, avançai-je pour tenter de la persuader. Puis nous n’aurons plus d’autre choix que de marcher jusqu’en Forêt d’Or, tu es sûre de vouloir laisser les chevaux derrière nous ?
– L’eau froide me tiendra éveillée, répondit-elle sur un ton amer. J’aimerais maintenant pouvoir me concentrer pour ne pas me tromper de direction.

Mais quelle mouche l’avait-elle piquée tout à coup ? Je décidai de ne pas en rajouter toutefois. Nous continuâmes à pénétrer plus avant dans le marécage, et l’ambiance fut silencieuse pendant une heure ou deux. Un petit brouillard commença à nous entourer, comme pour nous rappeler que nous étions bien loin de la chaleur d’un feu de camp. Au bout d’un moment, je ne pus cependant me retenir de faire tout commentaire en écoutant les claquements de dents qu’elle faisait.

– Chandra, tu es en train de te rendre malade ! explosai-je.
– Dis plutôt que tu ne peux pas supporter que je rende ton corps malade, me répondit-elle sur le même ton, en s’arrêtant et en se retournant vers moi. Toute trempée, elle faisait peine à voir.
– A ce train-là, tu sais bien que tu ne tiendras pas !
– Je fais de mon mieux, Lizeth ! Ne peux-tu comprendre cela ?! Nous avons pris énormément de retard dans ces marais, et si tu veux tout savoir, oui, je regrette de ne pas avoir fait demi-tour avec les chevaux tout à l’heure pour contourner cet endroit maudit !

C’était la première fois qu’elle admettait une erreur et qu’elle en exprimait des remords. Ma colère s’évanouit soudain et je pus même ressentir la frustration qui parcourait mon corps à ce moment présent. J’étais toutefois persuadée qu’elle avait encore quelque chose à m’avouer.

– Je… tout se ressemble ici, continua-t-elle plus calmement, en essayant de maîtriser sa mâchoire tremblante de froid. Et même si je voulais revenir en arrière, je n’en serais pas capable. J’ai complètement perdu le nord, et avec ces nuages, je ne peux pas me référer aux étoiles. Nous sommes perdues !

J’allais répondre quelque chose quand je remarquai que le brouillard s’était considérablement épaissi autour de nous. Une seconde plus tard, un éclat argenté me transperça de part en part et percuta Chandra de plein fouet. Elle fut projetée en arrière et atterrit dans l’eau. Alors que je tentais de me remettre de l’étrange sensation que j’avais eue au contact avec la lumière, un sentiment oppressant m’envahit. Je regardai en direction de Chandra et je la vis en train de se débattre contre quelque chose d’invisible.

– CHANDRA ! hurlai-je.

D’énormes bulles d’air accompagnées d’éclaboussures remontaient de la zone où elle se trouvait. Je m’approchai pour l’aider, mais je me paralysai soudain, les mains vers l’avant, doutant de mes capacités. C’est alors que ce qui maintenait Chandra sous l’eau devint quelque peu visible. C’était une forme humanoïde transparente, comme un fantôme. Je me surpris à penser pendant une fraction de seconde que cela pouvait être un esprit de même nature que moi. Frénétiquement, je regardai aux alentours, m’attendant à voir quelqu’un nous observant d’entre les roseaux. Ne voyant rien, mon regard se porta de nouveau vers Chandra, qui se débattait de moins en moins. La panique brouilla mon esprit, bloquant toute réflexion cohérente. L’instinct de survie fut le plus fort et remplaça tout le reste. Lorsque je touchai la forme spectrale de l’assaillant, un violent picotement me parcourut les mains et les bras. Cependant, je pus constater que je pouvais exercer directement une force sur elle. Je la forçai à lâcher prise et avec un gros effort de volonté, je l’obligeai à la faire reculer. Je fis alors barrage entre Chandra et l’attaquant, et restai concentrée dans le besoin.

– Qui êtes-vous ? demandai-je à l’esprit. Et que nous voulez-vous ?

Je ne reçus comme réponse qu’un éclat de rires… qui me rappela quelqu’un d’autre. Je distinguai maintenant parfaitement la silhouette devant moi et retins de justesse un hoquet de surprise en reconnaissant Gologmolva.

– Mais… comment est-ce possible ?! m’exclamai-je.
– Je suis plein de ressources, je pensais que vous l’auriez déjà compris depuis le temps, répondit-il sur un ton hautain.
– Pourquoi vous acharner contre nous ? Ça devient ridicule !

Alors que le monde était déjà plein de dangers, il avait fallu que nous tombions de nouveau sur lui. Gologmolva rit de plus belle pendant encore quelques secondes, puis redevint calme.

– Ma Reine, je vais vous accorder une réponse aujourd’hui. Posez la question que vous voulez, je vous répondrai avec la plus grande franchise. Ça doit juste être une question que vous ne m’avez encore jamais posée.

Mais à quoi jouait-il donc, bon sang ? Il semblait toujours vouloir aller plus loin, me pousser davantage dans mes retranchements, prendre le risque de me tuer, et pourtant, il s’en amusait. Cependant, il m’offrait là quelque chose qui pourrait m’être utile. Je tentai de me repasser mentalement toutes les rencontres que j’avais eues avec lui. Un sujet me préoccupait particulièrement.

– Comment va ma mère ? l’interrogeai-je.

Ma mère, enlevée par les sbires du Seigneur des Ténèbres, torturée selon ma sœur, dans de bonnes conditions selon d’autres. Qu’en était-il vraiment ? Gologmolva esquissa un sourire.

– Votre mère se porte comme un charme, elle apprécie sa captivité et attend patiemment votre arrivée.

Il avait donné sa réponse avec une telle nonchalance, comme si elle avait été calculée à l’avance. Cela commença à me mettre hors de moi.

– Bon, il est temps d’y aller ! déclara-t-il. De plus, ne trouves-tu pas ce silence plutôt pesant ?
– Chandra ! pensai-je en me retournant.

Mon corps flottait à la surface de l’eau, immobile. Mais comment avais-je pu être autant absorbée par Gologmolva au point de ne plus penser à Chandra ? Sans trop y penser, je réussis à la toucher, et à la tirer vers la berge la plus proche. Elle avait le visage encore plus pâle que d’habitude, mais par miracle, elle semblait avoir juste perdu connaissance. Je la plaçai sur le côté, et au bout de quelques minutes, la vis en train de grelotter. Machinalement, je tentai de rassembler le plus de bois flotté que je pus trouver, et bien qu’il soit humide, allumai un feu… par ma seule volonté !

– Hé bien ! Me voilà pyromancienne… murmurai-je.

Le brouillard était parti, et même les nuages. La lumière de la lune illuminait maintenant les alentours, et se reflétait dans le jaune des iris, offrant un très beau spectacle que j’aurais aimé contempler dans d’autres circonstances. Gologmolva avait orchestré leur rencontre de toutes pièces, usant de maléfices encore plus vils que d’habitude.

Catégories: BG de Lizeth Fanfiction LOTRO

Solena

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